iCHSTM 2013 Programme • Version 5.3.6, 27 July 2013 • ONLINE (includes late changes)
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Des patients agités aux maladies étudiées: la transformation du statut épistémologique du patient et de la maladie mentale
Smaïl Bouaziz | Institut d’Histoire et de Philosophie des Sciences et des Techniques, France

David H. Healy et J.-N. Missa ont montré qu'au cours des années 1950-1960, la 4560-RP (chlorpromazine) et du R-1625 (halopéridol) furent les principaux moteurs de la révolution théorique et pratique de la psychiatrie, qui commence alors à changer radicalement de visage. Mais dans un champ aussi complexe, l'emploi du terme de « révolution » doit être justifié, et implique de distinguer l'aspect pratique de l'aspect théorique. En clinique, les résultats de la chlorpromazine suscitent autant de circonspection que d'enthousiasme ; la diffusion mondiale du médicament se heurte à énormément de résistances. A bien y regarder, la « révolution neuroleptique » des années 1950, n'eut pas tant lieu dans la clinique que dans les façons de concevoir et d'étudier les maladies mentales. Notre hypothèse de travail est la suivante : pour comprendre en quoi on peut parler de « révolution », il faut paradoxalement se détourner de l'aspect pratique-clinique de la psychiatrie pour examiner les effets théoriques des psychotropes, et clarifier les méthodes de recherche élaborées pour comprendre la maladies mentale via l'étude des effets comportement et physiologiques des médicaments sur les patients. Car ce qui paraît avoir échappé à l'attention des historiens de la psychiatrie biologique, c'est que cette entrée subite de la maladie mentale dans le laboratoire du biologiste ne pouvait qu'entraîner un changement radical dans la signification de la notion de « malade » ou de « patient », changement décisif pour comprendre le évolutions ultérieures de la psychiatrie biologique. Nous nous intéresserons pour cela au cas du National Institute of Health : en effet, à partir de l'entrée en vigueur du « Mental Health Act », en 1955, le N.I.H. accueille un ensemble de travaux de biologie, de neurophysiologie et de pharmacologie expérimentales sans précédent. Nous montrerons comment ce changement dans le statut épistémologique du patient est intervenu dans les requalifications conceptuelles que la, ou plutôt les maladies mentales ont connues au cours de ces premiers travaux de recherche.