iCHSTM 2013 Programme • Version 5.3.6, 27 July 2013 • ONLINE (includes late changes)
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Une «science» dans la ville: la géographie à Lyon, 1870-1939
Pascal Clerc | University Claude Bernard Lyon 1, France

Les recherches en histoire et épistémologie de la géographie portent en général, en France, sur la « géographie académique », appelée aussi « géographie scientifique » ou « géographie universitaire ». Cette approche qui borne étroitement le champ d’étude, contribue à construire une représentation de ce monde savant comme un objet autonome, déconnecté de la sphère publique et de ses contingences. Mais, si l’on adopte un autre point de vue en s’intéressant à un acteur ou un groupe d’acteurs, à un lieu (une ville, un État) où circule les savoirs, à une pratique, ou si l’on mobilise des outils comme ceux de l’histoire spatiale des sciences, on peut assez facilement mettre en évidence les relations étroites entre le monde académique et la sphère publique. La communication proposée est une analyse de l’espace intellectuel de la colonisation à Lyon entre les années 1870 et l’entre-deux-guerres. Durant cette période, les savoirs géographiques s’articulent de diverses manières avec les questions coloniales et au sein des milieux politique, économique et commercial. Prenons quelques exemples qui pourront être développés lors de la communication : la mobilisation de savoirs géographiques dans les missions « économico-coloniales » ainsi que dans la mise en espace des musées et des expositions ; le crédit accordé à la géographie pour développer un enseignement colonial et les liens entre l’Université et la Chambre de Commerce pour organiser cet enseignement ; la production de connaissances géographiques en « situation coloniale » et leur mobilisation dans la sphère académique ; l’engouement pour les savoirs géographiques coloniaux dans la sphère publique et les médias de l’époque. À différents niveaux et de différentes manières, les relations entre la géographie académique et l’environnement local sont étroites. Pour interpréter cela, nous examinerons notamment l’hypothèse selon laquelle le milieu universitaire lyonnais, alors très restreint, aurait été condamné à sortir de son pré-carré et, pour exister, aurait dû s’intégrer dans la sphère publique locale. De manière plus générale, la géographie académique ne peut plus être considérée comme un savoir pur, détaché de contingences sociétales, économiques ou politiques. À Lyon comme ailleurs, les savants géographes nouent des relations avec les cercles du pouvoir, de la religion, de la finance, du commerce… ; ils dépendent de financements publics, font des choix politiques, participent à la vie de la cité. Ces contingences diverses construisent des liens complexes entre la sphère savante et la sphère publique.